L’EPFL veut renforcer les compétences transverses dans les cursus

Pour avoir un impact positif sur la société, disposer de connaissances scientifiques et techniques pointues dans un domaine ne suffit pas. Les problèmes toujours plus complexes demandent de l’interdisciplinarité, la prise en compte des notions d’éthique et de durabilité et une grande capacité d’adaptation. C’est pourquoi l’EPFL souhaite renforcer dans ses cursus l’acquisition de compétences transverses. Soit «des compétences qui peuvent se transférer dans n’importe quel contexte», comme le définit Tamara Milosevic, la directrice du nouveau Centre de compétences transverses qui comprend également les activités de l’ancien Centre de carrière.

La communication, le travail en équipe, la gestion de projet, la pensée systémique et créative, la liste des atouts qui peuvent s’appliquer dans des domaines variés est très longue. «Je me réjouis beaucoup de l’avènement de ce nouveau centre. Nos étudiantes et étudiants pourront ainsi compléter leur formation technique avec des compétences transverses, afin d’assurer leur excellence en tant qu’architectes, ingénieurs, et scientifiques, aptes à collaborer de manière interdisciplinaire», remarque Kathryn Hess Bellwald, vice-présidente associée pour les affaires estudiantines et l’outreach.

Combler le fossé

La première étape est de «cartographier ce qui existe déjà» et de «discuter avec les sections pour établir les compétences prioritaires», relève Tamara Milosevic. Une étude réalisée grâce à l’analyse des descriptions des fiches de cours des programmes Bachelor et Master a déjà montré qu’il y a un fossé entre ces deux niveaux, avec un sérieux besoin de renforcer les compétences transverses au Bachelor.

«C’est d’autant plus important que celles-ci jouent un rôle dans la réussite des études», note la directrice qui était auparavant conseillère pédagogique au Centre d’appui à l’enseignement (CAPE). Sans compter qu’elles permettent une meilleure insertion professionnelle, car à l’heure actuelle, en matière de compétences transverses, il existe toujours une inadéquation entre les attentes des employeurs et la formation des ingénieurs. Selon un questionnaire mené en 2021 par le CAPE auprès d’environ 800 alumnis EPFL, plus de 40% d’entre eux ont rapporté avoir dû combler des lacunes en gestion de projet et en expérience de «la vie réelle». Et près de 30% ont mentionné un manque de formation au leadership.

Être explicite et donner des retours

L’autre problème soulevé par l’étude est qu’à l’heure actuelle les compétences transverses sont majoritairement enseignées à l’EPFL dans des cours de sciences humaines et sociales à choix et dans des cours optionnels. «Ceci doit changer, il est essentiel qu’elles apparaissent de manière claire dans les cursus de base et qu’elles soient enseignées graduellement. Notre rôle est d’informer les enseignantes et enseignants et de les soutenir dans la mise en place de méthodes adaptées pour la transmission de ces compétences», note Tamara Milosevic.

Parmi les moyens d’enseigner celles-ci, l’apprentissage par projet est souvent plébiscité. Une bonne méthode à condition que les compétences transverses ciblées soient explicitement mentionnées dans les objectifs d’apprentissage. «Nous avons réalisé une étude montrant que lorsque cela n’est pas le cas, l’apprentissage est minime, explique Roland Tormey, responsable du CAPE. Réaliser un projet ne suffit pas, il faut amener les étudiantes et étudiants à s’interroger sur le processus, comment et pourquoi on fait les choses de cette manière. Pour ceci, le feedback est très important ainsi qu’une évaluation qui ne se focalise pas uniquement sur le résultat final.»

Il est essentiel que les compétences transverses apparaissent de manière claire dans les cursus de base et qu’elles soient enseignées graduellement. Notre rôle est d’informer les enseignantes et enseignants et de les soutenir dans la mise en place de méthodes adaptées pour la transmission de ces compétences.

Tamara Milosevic, directrice du Centre de compétences transverses et de carrière

L’évaluation constitue d’ailleurs un défi pour ce type de compétences. «Certaines d’entre elles se manifestent dans un contexte, et c’est parfois difficile d’observer sans impacter. Une option est de fournir les outils pour une évaluation des pairs, dans une approche formative, c’est à dire sans noter. Suivre l’acquisition de ces compétences au long des études via une auto-évaluation est aussi très pertinent. Si les étudiantes et étudiants sont familiers avec celles-ci, ils seront plus à l’aise pour les valoriser par la suite», détaille Tamara Milosevic. Et de conclure, «en étant à la tête d’un centre de compétences transverses et de carrière, mon but est d’assurer cette continuité entre le milieu académique et professionnel.»

Author(s): Laureline Duvillard
Importé depuis EPFL Actu